Le sentiers de la gloire
(PATH OF GLORY)
1957 – États-Unis
Fiche technique
Réalisé par Stanley Kubrick
Scénario de Stanley Kubrick, Calder Willingham et Jim Thompson d’après le roman de Humphrey Cobb
Musique de Gerald Fried
Avec Kirk Douglas, Ralph Meeker, Adolphe Menjou, George Macready
Durée : 1h28
Synospis :
1916, dans l’enfer des tranchées du Nord de la France. Le général de brigade Mireau donne l’ordre au régiment du colonel Dax de prendre d’assaut une colline nommée “la Fourmilière” sans renforts ni préparatifs, et avec peu de préparation d’artillerie. L’attaque est brutalement repoussée par l’artillerie allemande et les soldats se replient pour échapper à la mort. Le général Mireau donne alors l’ordre d’ouvrir le feu sur ses propres troupes afin de les forcer à repartir au combat, mais son officier d’artillerie refuse. Il décide alors de traduire le régiment en Conseil de guerre pour “lâcheté”. Le colonel Dax prend alors la défense de ses hommes menacés d’être fusillés pour l’exemple. Il obtient que seuls trois, un par compagnie, soient jugés. Dax doit ensuite convaincre le général Broulard de l’irresponsabilité et de la cruauté des agissements du général Mireau à l’origine de la mutinerie. Malgré ses efforts et ses argumentations, les trois combattants sont condamnés à mort et fusillés. Broulard accepte néanmoins d’ouvrir une enquête sur le général Mireau et propose le commandement de la brigade à Dax. Celui-ci, écœuré par la manipulation de l’état-major, refuse et préfère retourner au feu aux côtés de ses hommes.
United Artists – Tous droits réservés
Contexte historique
Les sanglantes offensives de 1916, même si le film est fait surtout écho aux semaines qui suivirent la bataille du Chemin des Dames, orchestrée par le général Nivelle d’avril à juin 1917, au cours de laquelle les troupes françaises perdirent plus de 187 000 soldats dans une tentative de repousser le front en provoquant le repli des troupes allemandes. Face à l’hécatombe, au sentiment d’un sacrifice vain, de nombreux régiments se mutinent et refusent de monter au front. La répression est sévère. Plus de 3 500 mutins furent jugés devant les Conseils de guerre et 600 furent « fusillés pour l’exemple ».
Contexte de production
Œuvre anti-militariste et plaidoyer pour la réconciliation entre les peuples, ce 4ème film de Stanley Kubrick, projet porté par un Kirk Douglas à la fois producteur et comédien, explore l’une des zones d’ombres et volontairement occultée de l’Histoire de la Première Guerre mondiale. Loin de la vision commémorative des précédents films sur 14-18 (comme J’accuse d’Abel Gance, Les croix de bois de Raymond Bernard ou A l’Ouest rien de nouveau de Lewis Milestone), le réalisateur de Lolita et du futur Spartacus apporte un souffle de modernité et de réalisme à la reconstitution des combats et de la vie quotidienne des poilus. Kubrick et ses scénaristes s’inspire de différentes révoltes au sein de l’Armée française depuis les premières offensives de 1914 jusqu’aux sanglantes campagnes de 1917, en particulier l’affaire des caporaux de Souain en révolte contre leur général qui avait fait tirer sur ses propres hommes. Il décortique avec minutie et pédagogie les mécanismes psychologiques qui ont conduisirent ces vétérans des tranchées désespérés à se rebeller contre leur état-major pour reconquérir leur dignité. Le film est en effet une charge sévère contre les officiers et la haute hiérarchie militaire considérée comme irresponsables et déconnectés du terrain. Le Conseil de guerre et le procès militaire des mutins (constituant d’ailleurs l’une des rares erreurs historiques du film puisque le tribunal mis en scène est un tribunal américain et non français) est à ce titre une scène clé. Ce thème sera d’ailleurs repris dans d’autres œuvres comme Des hommes contre (Uomini contro de Francesco Rosi, 1970) ou Un long dimanche de fiançailles (Jean-Pierre Jeunet, 2004).
Anecdotes
Les sentiers de la gloire fait partie de ces classiques qui ont marqué l’Histoire du Cinéma par le parfum de scandale qui entoura le film lors de sa sortie. Les mutineries de 1917 demeurant toujours un sujet tabou dans une France alors empêtrée dans la Guerre d’Algérie et confrontée à un courant d’objection de conscience de plus en plus important, la United Artists préféra éviter les polémiques en renonçant à distribuer le film en France, cédant à la pression du Gouvernement français et des associations d’anciens combattants. Les sentiers de la gloire ne reçut ainsi l’autorisation d’être projeté et n’obtint officiellement son visa d’exploitation par la censure hexagonale qu’en 1975.