Le joueur de go

L’ère Edo, point d’orgue du Japon féodal qui s’étend de la prise de pouvoir de Tokugawa Ieyasu vers 1600 à la restauration Meiji en 1868 est pour les cinéastes nippons un inépuisable et fécond réservoir d’histoires et d’archétypes. C’est dans ce contexte historique mouvementé et guerrier que s’ancre le « chambara », genre populaire mettant en scène des samouraïs et des ronins, généralement solitaires, dont les films d’Akira Kurosawa et la série des Zatoïchis (le masseur aveugle expert en maniement du katana) sont les éminents représentants. Le joueur de go en reprend les codes visuels et narratifs tout en décentrant la violence autour de la pratique du jeu de go. Avec cette histoire de vengeance et son approche psychologique de l’univers des samouraïs, le réalisateur Kazuya Shiraishi met en scène les mutations politiques et sociales qui agitent le Japon de la première moitié du XIXème siècle. La finesse et la précision de sa reconstitution d’Edo souligne la confrontation entre tradition et  modernité au sein d’une féodalité insulaire en proie au doute et qui finira par déboucher sur l’ouverture au monde de l’ère Meiji et précipitera la chute des samouraïs.